Complications graves de l’hypertension Artérielle :

Dans un rapport de l’OMS publié en mai 2024, l’élévation de la pression artérielle systolique, autrement appelée hypertension artérielle, est décrite comme étant le principal facteur de risque de décès et d’invalidité en Europe.

En 2019, l’hypertension artérielle a ainsi été à l’origine de 24 % des décès et de 13 % des handicaps pour les populations qui vivaient en Europe.

Ainsi, chez les hypertendus, les morts de cause cardiaque (le plus souvent du fait d’un infarctus) ont été 2 fois plus nombreux que les morts liés à un AVC et 10 fois plus fréquents que les morts secondaires à une maladie des reins.

En résumé, l’hypertension artérielle, si elle n’est pas dépistée ou si elle diagnostiquée mais pas soignée, peut être à l’origine d’un décès, le plus souvent brutal, dont la cause est cardiaque.

Pour connaître sa tension, on peut aujourd’hui faire un AutoTest.

L’AutoTest de la Tension consiste à mesurer sa tension avec un tensiomètre automatique.

Le brassard peut être positionné au-dessus de la manche d’un vêtement. La mesure doit être réalisée en position assise.

Si la première mesure indique une SYS à 141 ou plus ou une DIA à 91 ou plus, il faut réaliser une deuxième mesure sur le même bras sans attendre plus d’une minute entre les 2 mesures.

Si la deuxième mesure reste élevée, il est conseillé d’effectuer une automesure sur 3 jours.

Pour en savoir plus sur les complications de l’hypertension artérielle, posez vos questions en activant le bouton « Réponse Hypertension » du site de la Fondation Hypertension (le texte est rédigé par chatGPT4 exclusivement à partir des contenus du site frhta.org).

Incidence and autopsy rates for sudden cardiac death in Northern Finland, (Heart Rhythm 2024;21:682–683)

Mort rénale chez les hypertendus : qui est concerné ?

Entretiens du Pr Girerd

Dr Sébastien Rubin, néphrologue, Bordeaux

Pr Xavier Girerd : Est-ce qu’on peut avoir des hypertensions sans avoir de maladie des reins ?

Pr Sébastien Rubin : La physiologie – c’est-à-dire l’étude du fonctionnement du corps humain – nous montre depuis maintenant de longues années que les personnes qui ont une hypertension artérielle ont toutes une anomalie d’excrétion du sel et de l’eau via les reins. Donc ils ont tous une maladie des reins.

X.G. : Donc l’hypertension artérielle, c’est une maladie des reins qui s’exprime au niveau du cœur et des artères ?

S. R. : Absolument.

X.G. : Les maladies des reins chez les hypertendus sont fréquentes : est-ce qu’on peut mourir de ses reins quand on a de l’hypertension ?

S. R. : L’hypertension artérielle peut se compliquer de ce qu’on appelle une mort rénale, c’est l’arrêt du fonctionnement des reins, c’est-à-dire que la fonction rénale ne marche plus.

X.G. : Est-ce que c’est quelque chose qui survient brutalement ou lentement ?

S. R. : Dans la majorité des cas, ça survient lentement, c’est l’évolution, la progression d’une maladie chronique.

X.G. : Lentement ça veut dire que ça prend plusieurs semaines, plusieurs mois, plusieurs années ?

S. R. : Tous les cas de figures sont possibles : le plus souvent, la maladie rénale chronique est une maladie de long cours, c’est un marathon, ça prend plusieurs mois ou années.

X.G. : Donc des patients qui ont de l’hypertension artérielle risquent d’avoir leur rein qui ne fonctionne plus et ce qu’on appelle l’insuffisance rénale terminale ?

S. R. : Chronique, et dans les stades les plus sévères elle est appelée terminale.

X.G. : Ça peut être brutal chez l’hypertendu la mort rénale ?

S. R. : Ça peut être brutal dans certaines formes d’hypertension artérielle : l’une de ces formes c’est l’hypertension artérielle maligne qui est une forme très agressive d’hypertension et qui là peut détruire les reins en quelques jours ou quelques semaines.

X.G. : Et ça survient chez quel genre de patient l’hypertension artérielle maligne qui détruit les reins en quelques jours ?

S. R. : Il y a plusieurs formes encore une fois, mais dans la majorité des cas, ça survient chez des patients qui ont une hypertension artérielle finalement assez standard, assez classique et qui interrompent leur traitement et brutalement l’hypertension devient très agressive et elle peut détruire les reins.

X.G. : Donc l’interruption du traitement est un risque de voir apparaître la mort des reins rapidement ?

S. R. : Via une hypertension artérielle maligne, absolument. C’est un terme qui a à peu près un siècle maintenant, c’est parce qu’avant les nouveaux traitements, les patients qui avaient ces formes d’hypertension artérielle en mouraient, notamment via leur atteinte rénale. Aujourd’hui, avec les nouveaux traitements de l’hypertension artérielle et aussi les traitements de suppléance du rein, c’est-à-dire qu’on peut remplacer le fonctionnement du rein, on ne meurt plus.

X.G. : La fameuse dialyse ?

S. R. : Comme la dialyse ou la greffe de reins.

X.G. : Comment on sait qu’on a une hypertension maligne ? ça fait mal ?

S. R. : L’atteinte des reins ne fait jamais mal dans le dos, par contre l’hypertension artérielle maligne peut s’accompagner de symptômes : les patients sont fatigués, ont des flous visuels, ont également des chiffres de pression artérielle très élevés.

X.G. : Ils ont mal la tête je crois ?

S. R. : Absolument !

X.G. : Et on perd du poids ?

S. R. : Oui on perd du poids parce que l’hypertension artérielle maligne fait perdre beaucoup d’eau et de sel par les reins, c’est-à-dire que la pression appuie très fort sur les reins et donc le rein a une fuite d’eau et de sel et c’est cette fuite d’eau et de sel qui fait perdre du poids.

X.G. : D’accord, donc l’hypertension maligne ça peut tuer les reins en quelques jours et c’est particulièrement risqué si les gens arrêtent leur traitement j’ai compris. Maintenant, l’autre forme de de mort rénale, plus lente, qui peut prendre quelques années, est-ce que vous pourriez nous décrire quels sont les hypertendus qui sont sujets à pouvoir faire ces maladies de mort du rein lente ?

S. R. : Alors, le principal facteur de risque chez un patient hypertendu d’avoir une atteinte rénale c’est si, en plus de son hypertension artérielle, il a un diabète. Le diabète c’est absolument terrible pour les vaisseaux.

X.G. : C’est quel diabète : est-ce que c’est le diabète où on a de l’insuline ou c’est le diabète où on est en surpoids ?

S. R. : C’est plutôt le diabète où on est en surpoids, qui est le diabète de type 2, qui est une maladie plus complexe, qui est une maladie métabolique plus complexe et cette maladie, quand elle se cumule à l’hypertension artérielle, ce qui est très fréquent, peut être très agressif pour les reins.

X.G. : Est-ce que tous les patients qui ont du diabète terminent avec une mort rénale, est-ce qu’il y en a certains qui peuvent y échapper ?

S. R. : Bien heureusement que oui ! Le travail du néphrologue que je suis, c’est de tout faire pour éviter cela, ralentir la progression de l’atteinte rénale, et chez les patients qui sont hypertendus et diabétiques, les meilleurs moyens d’éviter une atteinte rénale sévère jusqu’à la mort rénale c’est bien sûr de contrôler la tension, contrôler son diabète, et toutes les mesures de prévention de l’atteinte rénale.

X.G. : Contrôler sa tension : ce mot « contrôle » ça veut dire quoi, ça veut dire qu’il faut prendre ses médicaments et qu’il faut la mesurer chez soi ? Ou est-ce qu’il y a d’autres choses à faire , Même dans les médicaments, il y a des médicaments qui sont plus actifs que d’autres pour protéger le rein ?

S. R. : Pour contrôler sa tension artérielle, si on veut protéger son rein, donc quand on parle de contrôle c’est avoir des chiffres de pression artérielle à la maison qui sont contrôlés, c’est-à-dire au moins pour tout le monde en-dessous de 135/85 pour faire simple, voire plus bas si on est en bonne santé, en bon état général, et puis après il y a des médicaments qui sont très néphroprotecteurs, et parmi ces néphroprotecteurs on connaît les médicaments qui bloquent un système hormonal qu’on appelle le système rénine-angio-tensine.

X.G. : Est-ce que les médicaments dits « diurétiques » sont mauvais pour les reins ? Souvent c’est ce que disent les patients « non c’est mauvais pour mes reins, je vais pas en prendre », c’est vrai ou pas ?

S. R. : Alors non, c’est pas vrai, l’effet indésirable des diurétiques, s’ils sont trop dosés, si on est intoxiqué par trop de diurétiques, là il peut y avoir un danger pour les reins.

X.G. : Est-ce que les médicaments diurétiques ça protège les reins ou ça les abîme ?

S. R. : Si on veut contrôler la pression artérielle, on a souvent besoin de diurétique dans la maladie rénale chronique, et dès lors ça les protège puisque ça va contrôler la pression artérielle.

X.G. : Donc il faut que les patients prennent le traitement prescrit par le médecin, même si c’est un traitement diurétique, ça protège leurs reins chez l’hypertendu, on est d’accord avec ça ?

S. R. : On est parfaitement d’accord.

X.G. : Les patients souvent disent : « pour protéger mes reins, il faut que je boive beaucoup », est-ce que vous pouvez nous dire si c’est vrai, si c’est pas vrai ?

S. R. : Le principal message, c’est que pour protéger ses reins il faut éviter les déshydratations donc quand on est une personne plutôt jeune, au milieu de sa vie, on a la sensation de soif et donc il faut boire à sa soif, et il faut boire davantage quand il y a les épisodes de grande chaleur qui sont maintenant fréquents. Par contre, quand on vieillit, on perd cette sensation de soif, on parle de patient autour de 80 ans, donc chez ces patients, pour éviter, puisqu’ils n’ont plus cette sensation de soif, pour éviter la déshydratation mais pour protéger ses reins ça ne sert à rien de boire 2, 3, 4, 5 litres d’eau, il faut boire à sa soif, notamment quand on a cette sensation de soif.

X.G. : Est-ce que vous fixez une quantité d’eau maximum à ne pas dépasser ?

S. R. : Non, il n’y a pas de quantité d’eau maximum à ne pas dépasser. Quand les patients me demandent, je leur dis qu’il faut boire, ce qui est dit en population générale pour tout le monde, au moins 1,5 litre d’eau par jour ;

X.G. : Faut pas en boire 3 ? On est d’accord ?

S. R. : Aucun avantage !

X.G. : C’est même parfois dangereux parce qu’il y a des médicaments, quand on boit trop, on se noie, les médicaments diurétiques justement en fait c’est plutôt défavorable, vous me confirmez ça ;

S. R. : Quand on boit 3, 4, 5 litres d’eau par jour non.

X.G. : Ça il ne faut pas le faire, même quand on a une atteinte rénale ? Vous me le confirmez. Et puis dernière chose, on dit qu’il ne faut pas manger de viande, de protéines quand on a une maladie rénale. Vous pouvez nous dire si c’est vrai et pourquoi ?

S. R. : Alors sur les protéines, ce qu’on a conseillé très longtemps et qu’on continue de conseiller, c’est d’avoir des apports raisonnables en protéines, ça veut pas dire ne plus manger de viande, pas du tout, en fait on se rend compte si on regarde la consommation en protéines des Français par exemple, elles sont largement au-delà des besoins pour notre métabolisme.

X.G. : Si on mange un steak de 150 g de viande bovine par jour, c’est trop ou pas ?

S. R. : Non, aucun problème, ce qu’on conseille aux patients qui ont une maladie rénale chronique, encore plus quand elle est avancée, c’est d’essayer de limiter les rations de protéines animales à un repas par jour. C’est-à-dire par exemple s’il veulent manger un steak le midi ou un steak le soir, il n’y a pas de problème, mais on leur dit d’éviter de manger un steak le matin, un steak le midi et un steak le soir.

X.G. : Et puis dernière chose : le sel. Alors le sel tout le monde dit que le sel il faut ne pas en manger quand on est hypertendu, ce qui n’est pas la recommandation, il faut éviter les excès mais quand on a une maladie rénale est-ce qu’on peut continuer à manger du sel en quantité normale ou il faut limiter son sel ?

S. R. : ça dépend ce qu’on attend derrière le mot normal. Il y a trois niveaux : il y a le régime sans sel. Moi je le recommande pas le régime sans sel qui est très strict et très difficile à suivre mais si derrière le mot normal se cache la consommation habituelle des Français, il ne faut pas faire ça, parce que les Français mangent beaucoup de sel. Nos alimentations actuelles ont beaucoup de sel.

X.G. : Il y a eu un rapport de l’OMS, publié très récemment, qui montre que, en France, la moyenne de la consommation sodée est de 7 g pour les femmes et 8 g pour les hommes alors que en Italie, en Allemagne c’est 10 g. Donc, en fait, on mange moins de sel que nos voisins. Les Allemands mangent beaucoup de charcuterie et c’est pour ça qu’ils mangent plus de sel que les Français.

S. R. : Alors en France, il y a une variété, il y a une grosse diversité régionale sur les apports en sel selon où on habite, on n’a pas les mêmes alimentations en sel à Bordeaux, à Strasbourg ou à Lille, donc il y a cette variété géographique due à notre patrimoine culturel qui est fort sur le plan gastronomique, et quand je dis qu’on mange un peu plus de sel que l’on devrait c’est quand même vrai parce que ce même rapport de l’OMS rappelle les recommandations qui sont de 5 g de sel.

X.G. : Pourquoi l’OMS dit 5 g ?

S. R. : Ça se base beaucoup sur des études épidémiologiques, de la description, c’est pas des choses interventionnelles. Les patients qui ont une hypertension artérielle avec une maladie rénale chronique, quand on prend le temps de leur expliquer les apports raisonnables en sel, on fixe autour de 6 ou 5 g de sel par jour, on y arrive c’est possible de limiter son apport en sel et en fait ça passe par des mesures qui sont extrêmement simples, qui sont ne pas ressaler à table. Moi je dis aux patients : retirez votre salière de la table, vous pouvez saler un peu en cuisson mais ne ressalez pas à table. Et il y a d’autres petites astuces qui existent. Je sais que vous êtes très féru de ce fameux cube de cuisson pour les soupes qui sont des perfusions de sel, qui sont extrêmement salés. Donc on donne ces conseils aux patients et on arrive à limiter leur apport en sel. Et je suis bien d’accord avec vous : je ne parle pas de régime sans sel, je parle de régime raisonnable. Il faut savoir que dans la maladie rénale chronique, on a des patients qui sont hypertendus, qui sont diabétiques, qui ont une maladie rénale chronique avancée, et qui mangent non pas 10, non pas 12 mais 15, 20 g de sel par jour et chez ces patients-là il faut absolument les aider à baisser leurs apports.

X.G. : Il y a quand même une sacrée différence : 10 g on peut facilement manger 10 g dans une journée sans s’en rendre compte et 20 g il faut faire un bel effort ! 20 g c’est qu’on a mangé asiatique et qu’on a pris l’ensemble du litre de sauce asiatique. Donc oui il y a des pièges terribles, il n’y a pas beaucoup de gens qui consomment 20 g, en France en tout cas dans les études qui ont pu être faites.

S. R. : Parce que ces études elles sont faites beaucoup en population générale, elles ne sont pas faites chez les patients qui ont les plus grosses atteintes rénales et hypertensives. Parce que si vous prenez une patientèle de néphrologue, donc on suit, on mesure leur quantité de sel ingéré grâce au recueil des urines des 24 heures, on voit l’excrétion du sel et tous nos patients ne sont pas à 20 g mais c’est pas du tout rare !

X.G. : Nous avons fait la même étude à Paris avec 1800 personnes qui sont venues en hôpital de jour de prévention cardiovasculaire et pour lesquelles on a fait le sodium urinaire des 24 heures et 20 g c’est 0,5 % de notre patientèle. Vous avez peut-être effectivement un foyer à Bordeaux où il y a des grosses consommation de sel, avec des traditions culinaires.

S. R. : En France, ou en tout cas dans l’expérience que j’ai autour de Bordeaux, des populations les plus fragiles, on voit que les apports en sel sont très bien corrélés à la fragilité socio-économique des patients, parce que plus ces patients sont fragiles, plus ils vont prendre des plats cuisinés, de la charcuterie, des aliments moins chers du commerce qui sont bourrés de sel et donc autour de Bordeaux, on a ce qu’on appelle les « anneaux de la pauvreté et de la misère » et donc on a à 60 km de Bordeaux des populations très fragiles et qui ont une alimentation très déstructurée avec des apports de sel importants.

X.G. : Merci beaucoup, à bientôt.